"Weinst du ?" [PV Whirlwind]

La tristesse avait envahi Lucio-Maël par ce samedi après midi. Le soleil brillait sur l'école, promettant à la plupart des élèves de passer la journée dans le parc ou en ville. Mais Lucio se sentait à des centaines de kilomètres de la bonne humeur ambiante. Peut être était-ce dû à sa courte nuit -une mission qu'il n'avait toujours pas accomplie l'avait retenu hors de son cher lit- ou bien son esprit pas encore habitué à être de retour en cours, toujours est-il qu'il n'était pas le moins du monde attiré par une sortie en groupe. Il déclina d'ailleurs quelques propositions.

Il avait croisé son colocataire le matin au petit déjeuné, mais ne l'avait pas revu depuis, ayant passé sa matiné enfouit dans un livre au fond de la bibliothèque. Il sauta le repas de midi pour faire quelques pas en solitaire dans le parc. L'été était encore là et ne semblait pas se douter que l'automne viendrait rapidement l'assassiner, quoi qu'il arrive. Le blond avait soupiré plusieurs fois, tentative vaine pour chasser le poids sur son coeur. Il savait bien qu'il ne parviendrait pas à l'effacer, et que même une fois qu'il semblerait l'avoir quitté, il serait toujours tapi au fond de son être, prêt à resurgir à tout moment.

Avant que tous les élèves affluent au dehors, il quitta l'étendue verte et fila sans se presser dans les couloirs, la tête baissée, le dos courbé, les yeux dans le vague, perdus dans d'heureux souvenirs, assombris par un final tragique - boum. Il ne faisait pas vraiment attention à l'endroit où il allait, tournant au hasard, de toute façon perdu dans les méandres de son esprits. Lorsqu'il finit par relever la tête, il n'était qu'à quelques mètres de sa chambre. Il gagna le pas de la porte et appuya sur la poignée. Fermé. Un tour de clé régla le problème. Il entra et referma derrière lui.

Il croisa son propre regard dans le miroir au dessus du minuscule lavabo de la pièce. Ses cheveux presque blanc étaient en désordre et ses yeux verts dissimulaient mal sa fatigue. Maël était vêtu de noir de la tête aux pieds : t-shit orné d'une tête de mort, pentalon aux jambes un peu large dans des bottes sanglées jusqu'à mi-molet. L'ange détourna vite le regard. Il avisa sa guitare dans un coin et son idée fut instantanée.

Le toit avait toujours été un de ses refuges favoris. Il ouvrit la fenêtre, se glissa dehors en faisant attention à l'instrument callé sur son dos et grimpa avec agilité sur le toit. Il s'installa de façon à ne pas être visible du parc -il doutait sérieusement qu'il était autorisé de se promener sur les hauteurs de l'école. L'endroit était calme, comme toujours.

Quelques minutes seulement après être arrivé à sa "cachette", il commença à jouer, un peu au hasard, suivant le cours de ses pensées. Très vite, le monde disparu autour de lui. Il était seul au milieu de ses pensées, juste bercé par une brise légère. Ainsi, il ne se rendit compte de rien lorsqu'il fut rejoint, tandis qu'il chantonnait en jouant.

- Jetzt sitz ich hier,
Und schreibe nur noch blinde Liebeslieder,
Von Herz und Schmerz und Schmalz,
Und so was Tolles kommt nie wieder ...*

Spoiler:

Après le repas, Whirlwind fit une escale dans les couloirs. La plupart des gens étaient dehors, donc il ne croisa que deux-trois personnes. Il ressentait la solitude au plus profond de son cœur ; bien qu'il n'était jamais réellement seul. Helfdane rentra dans sa chambre, vide, attrapa sa guitare au passage puis retourna se cacher dans une sorte de placard à balai, là où personne ne le trouverait. Il s'accorda puis commença à jouer dans un thème black metal dépressif à la Sleep Forever.

Weath n'avait pas fait attention ; une bonne demi heure était passée. Il décida de se réfugier au plus haut : le toit, de manière à observer les gens, comme il avait l'habitude de faire. Il avançait presque inconsciemment dans les couloirs, comme le chemin lui était familier puis partit dans des réflexions musicales sans intérêt car il avait envie de composer

-Euh ... Attends... Comment tu veux... Y'a aucun lien entre le FA ionien et le DO dièse majeur ...

Il s'arrêta et ses yeux s'écarquillèrent.

-... C'est pas les mêmes modes... FA ionien c'est pareil que Fa majeur donc gamme avec SI bémol et DO dièse majeur, 7 dièses...

Whirlwind se remit en marche.

-Bizarre, ça sonne sur un DO quinte ; RE dièse quinte ; FA dièse ... Et aparement on change de tonalité sur le refrain. les accords de la deuxième guitare sont : SOL dièse quinte ; LA dièse quinte mais sur l'accompagnement je fais du RE à certains moment... T'as une hypothèse ?

Helfdane arriva en haut du bâtiment et s'arrêta net en voyant Lucio-Maël. Il roula des yeux. Qu'est-ce qu'il fout là, lui ? On s'en fout, tu te coltines le gamin. Faut trouver un terrain d'entente avant de passer à l'action... On sait même pas s'il est du côté des méchants... T'es un chasseur ! Un chasseur a besoin de proie, et aujourd'hui, c'est lui.
Il avança vers le petit blond silencieusement, puis s'arrêta à 1 mètre de lui, et dit d'une voix puissante :

-C'est pas le bonheur en ce moment ?

Dis donc, t'as des couilles qui poussent ?

-C'est pas le bonheur en ce moment ?

La voix puissante provoqua un léger sursaut de la part de Lucio. Il cessa aussitôt de jouer, ainsi que de chanter. Ses yeux se dirigèrent vers la voix et trouvèrent Helfdane, comme prévu. La silhouette massive du brun se détachait nettement sur le ciel bleu. Le blondinet lui offrit un sourire en coin. Il n'allait pas bien, c'était sûr. Mais ce qui était encore plus sûr, c'est qu'il ne déballerait pas ses histoires au premier venu. Un demi mensonge serait amplement suffisant.

- Une chanson de mon enfance. Je ne pense pas que tu connaisses.

Les mots en allemand résonnaient encore dans sa tête, et ne semblaient pas décidés à partir. Ils s'accompagnaient de quelques images de sa mère, quelques années auparavent, avant que l'explosion vienne ruiner la vie heureuse de la famille. Lucio élargit son sourire et y ajouta un regard espiègle et plein de vie. Il fixa son attention sur le visage de son colocataire.

Il ne pouvais pas s'empêcher de remarquer chaque fois qu'il regardait un peu le brun la cricatrice qui le parcourait de la joue aux sourcils. C'était un détail, mais c'était plutôt intrigant. Son regard se fit plus perçant, cherchant à trouver une explication qui ne pourrait jamais venir d'elle même. Lucio-Maël se décida à lui demander. Enfin, pas imédiatement, ce serait trop direct.

- Bref, tout va bien. Qu'est-ce qui t'ammène ici au juste ?

L'amorce était bonne. Il ne restait qu'à attendre que le silence s'installe, et il pourrait poser la question qui lui brûlait les lèvres. Au moins, cela donnait un intérêt à ce visiteur qu'il n'attendait pas. Sans ça, il aurait probablement fait mine de ne pas le voir et aurait continuer à jouer et à chanter dans cette langue qu'il n'aurait d'ailleurs sans doute pas comprise.

Whirlwind regardait le blondin de haut, avec son sourire niais et ses yeux de biche. L'espèce de légère agression avait plu à son alter ego. Lucio sursauta puis leva les yeux vers Weath.

-Une chanson de mon enfance. Je ne pense pas que tu connaisses.

Cela te dirais quelque chose, mon cœur ? Brutal Disgorging ? Carcass ? Charles Bronson ? Libido Airbag ? Cannibal Corpse ? Sublime Cadaveric Decomposition ? Non... Normal que nous ne connaissions pas, on est plus du style jazz, tout ça, tout ça...

Le démon n'arrivait pas à transpercer l'âme du blondinet. Mais à ses yeux, il était trop beau pour être de son côté, cela n'en faisait aucun doute. Lucio-Maël contemplait la cicatrice de l'autre, il avait l'air intrigué ; quoi de plus normal.

- Bref, tout va bien. Qu'est-ce qui t'amène ici au juste ?

Whirlwind n'avait aucune réponse à lui donner. Sûrement pour la même raison que toi. Il s'exprima relativement rapidement, se répondant à lui même, comme à son habitude :

- Je viens ici pour être tranquille... Et seul... Mais on dirait que tu m'as piqué l'idée... Ou serait-ce moi ? Tu es plus ancien ... Ouais, évidement, c'est moi...

Helfdane leva ses yeux brusquement et scruta l'horizon. Il resta dans cette position quelques secondes puis s'assit sur le rebord, regardant le sol qui se trouvait à une dizaine de mètres.

C'est vraiment l'emmerde de devoir essayer de rapprocher des gens ici... C'est horrible ! Même dans le masochisme y'a une part de plaisir, ça, c'est de la pure torture !

La réponse de Helfdane ne se fit pas attendre. Les mots fusèrent rapidement, comme à son habitude. Il posait des questions auxquelles il répondait lui même. Décidément, le jeune homme ne semblait pas très à l'aise en société. Lucio-Maël songea qu'il ferait sans doute bien de le présenter à ses amis.

- Je viens ici pour être tranquille ... Et seul ... Mais on dirait que tu m'as piqué l'idée ... Ou serait-ce moi ? Tu es plus ancien ... Ouais, évidement, c'est moi ...

Le brun détourna alors le regard et le fixa loin dans l'horizon, comme s'il tentait de s'y perdre. Lulu ne le lacha pas des yeux. Etait-il réellement si gêné ? Le blondinet se demandait si ce malaise avait un rapport avec la marque sur l'oeil de son camarade. Après tout, l'évènement qui était à l'origine de cette cicatrice pouvait tout aussi bien l'avoir blesser psychologiquement.

Whirlwind était décidément un être intrigant. La curiosité de Maël était piquée à vif. Il aurait bien aimé poser toutes les questions qui fourmillaient dans sa tête. Mais cela serait pour le moins bizarre, et il ne voulait surtout pas offenser son colocataire ; ç'aurait été un mauvais point après seulement une petite semaine de cohabitation.

Lucio regarda le démon s'assoir sur le bord du toit. L'ange suivit son regard et posa également ses yeux verts sur le sol. Le vide ne l'impressionait pas le moins du monde. Après tout, il sortait presque chaque nuit par la fenêtre depuis plusieurs années. Le silence prenait de l'ampleur entre les deux garçons. Le moment était propice, le jeune O'Neill en profita donc pour poser sa question :

- Au fait, je me demandais ... Euh ... Sur ton visage, cette trace, tu t'es fait ça comment ?

Son ton se voulait doux et assuré. Au fond de lui, il espérait ne pas froisser le beau brun. En tout cas, sa visite inatendue et la curiosité qu'elle apportait rendait Lucio-Maël un peu plus léger, bien que la tristesse demeurt présente.

Whirlwind et Maël regardaient le sol à présent. Quelques instants passèrent avant que l'ange pose la question qu'il se posait depuis un moment déjà :

- Au fait, je me demandais ... Euh ... Sur ton visage, cette trace, tu t'es fait ça comment ?

Cette interrogation fit froncer les sourcils de Weath. Le démon se reprit vite car il ne voulait pas que Lucio s'en rende compte, puis il soupira. Il parlait désormais lentement.

Restons calmes...

-Eh bien... J'ai affronté mes démons... J'ai fais des choses pas nettes dans ma vie, dont je ne suis pas fier. Et puis tu sais, Le diable n'apparaît qu'à celui qui le craint.

Whirlwind eut un léger sourire en coin en prononçant sa dernière phrase. Le démon repensait à la manière dont il avait fracassé la tête du seigneur des mouches sur un rocher, juste avant de lui transpercer son cœur aussi froid que le vide avec sa main droite. Il se tourna vers O'Neill et lui susurra lentement à l'oreille :

-J'ai tué un démon...

Helfdane revint à sa place après avoir révélé une partie de son secret à Lucio, puis continuait à scruter l'horizon.

-Belzébuth ... Je l'ai tué !

Un sourire de psychopathe apparut sur son visage puis s'effaça aussi brutalement qu'il était venu.

-Mais ça ... C'était avant ... Kriss ! ... Ta gueule ! Avant qu'il ne ressuscite. Tu crois que je me cache pour quelle raison ?

Whirlwind attendait désormais la réponse de Lucio...

Lucio-Maël fixait avec insistance ses bottines sanglées, comme si il avait voulu les détacher du regard. Lorsque son voisin répondit, il fut surpris par le calme et la lenteur de ses propos. Il semblait avoir totalement perdu sa timidité habituelle, abandonnant ses bégayements et ses auto-questions.

- Eh bien ... J'ai affronté mes démons ... J'ai fais des choses pas nettes dans ma vie, dont je ne suis pas fier. Et puis tu sais, Le diable n'apparaît qu'à celui qui le craint.

WTF ? Il est pas net ce type.

Helfdane avait sourit lors de sa dernière phrase, ce qui laissait l'irlando-allemand encore plus stupéfait. Qu'est-ce qu'il déblatérait ? Y avait-il réellement quelque chose à comprendre ? C'est ce moment que le démon choisit pour cesser de zyeuter le sol et croiser le regard de Lucio, planté là, incrédule. Il se rapprocha, doucement tout d'abord, puis la tête du brun vint se coller près de celle de Maël.

- J'ai tué un démon ... lui chuchota-t-il à l'oreille.

Whirlwind repprit sa position initiale, ses yeux noirs perdus dans l'horizon. Sa voix avait pris une tonalité étrange, légèrement différente. Peut être avait il perdu les pédales suite à l'incident qui lui avait valu cette balafre ? Cela expliquerait bien des choses. Le blondinet ne lachait pas son colocataire du regard.

-Belzébuth ... Je l'ai tué !

Un instant, le visage du brun s'illumina d'un sourire presque inquiétant. Lucio-Maël fronça des sourcils interrogateurs, mais toujours pas convaincus.

- Mais ça ... C'était avant ... Avant qu'il ne ressuscite. Tu crois que je me cache pour quelle raison ?

Maël observa le visage de son ami pendant plusieurs secondes, les sourcils haussés et les yeux ronds. Puis, brisant à nouveau le silence entre eux, il éclata de rire. Celui-ci résonna dans l'air pendant un instant.

- Hah ! T'as faillit m'avoir ! Bien joué.

Il lui donna une tape amicale sur l'épaule, avant de se remettre à gratter, laissant échaper un air joyeux et rythmé. Lucio ne savait pas le moins du monde si Helfdane plaisantait vraiment, mais le contraire lui semblait plutôt improbable. En tout cas, sa propre tristesse était éloignée pour le moment. Il ne se faisait pas d'illusion, elle reviendrait le cueillir bien assez tôt.

L'attente dura quelques secondes, puis Lucio s'écria :

- Hah ! T'as faillit m'avoir ! Bien joué.

L'ange lui donna une tape sur l'épaule puis continua à jouer. Whirlwind n'avait pas quitté l'horizon des yeux. Il loucha. Puis ses yeux se dirigèrent vers le blond à côté de lui, sans que sa tête ait bougé, il le regardait de coin.

Euh ... Non mais je rêve ! Oublies ça, Herger... Oooh non ! Voir une araignée, c'est rien. Le pire c'est quand tu la vois plus !

Helfdane n'avait pas bougé, pendant que Lucio jouait. Herger, lui, voulait absolument lui faire comprendre.

Tu devrais lui offrir des fleurs... J'attends une vraie bonne occasion d'offrir des fleurs à ce mec. Son enterrement par exemple !

Weath savait bien que son colocataire ne croirait pas à ses dires, au fond. Il ne pouvait pas se dévoiler en tant que démon. Si son camarade de chambre était dans le clan des gentils, il voudrait le tuer et mettrait tous les moyens on œuvre pour y parvenir. Whirlwind s'offrait un petit instant de réflexion :

Tu te souviens de ce culte à la con de chasseurs de démons ? C'était plutôt des mercenaires over-christians qui avaient décidé de faire leur justice eux-mêmes. Bah tu fais comme d'habitude, tu t'invente une histoire... Tu fais chier ...

Herger se décida à briser le silence instauré par le manque de crédulité de Lucio. Il tourna lentement la tête vers ce dernier.

- Libre à toi de ne pas me croire. Gardes juste en tête que je suis un chasseur de démons. Je choisis de te le dire pour pas que tu te pose trop de questions quand je serai entrain de régler des comptes. Et ne t'imagine pas qu'il y aurait un certain prosélytisme derrière tout ça !

Herger n'avait aucune idée de ce qu'il venait de dire à Lucio.

J'étais comment ? ... Ne fait pas l'amour dans ton jardin, car l'amour est aveugle, pas ton voisin... Quoi ??? ...